A l’aube du 1ᵉʳ août 1960, Dahomey, accédant à la souveraineté internationale gagne son droit d’écrire sa propre histoire. Si dans les écoles, les manuels racontent surtout les tournants politiques et économiques, une autre page de l’histoire mérite d’être lue : le sport. Des guerres d’individualisme aux gestions monocratiques des institutions sportives, l’aventure sportive béninoise suit depuis 1960 des hauts et des bas, reflète ses élans et ses fragilités. D’une étape à une autre, le sport béninois a suivi des transformations marquantes.

1960‑1980 : le début d’une aventure passionnante
Au lendemain de l’indépendance, le sport était vu comme un outil de cohésion nationale. Ainsi l’organisation des compétions sportives s’intensifie. Dans les écoles, les rencontres sportives deviennent des moments de grand rassemblement. Le travail devient de plus en plus sérieux et les jeux de divertissements deviennent plus passionnants. Le Comité National Olympique et Sportive a été alors crée en 1962 pour représenter le sport béninois au Comité International Olympique. Petit à petit, les premières fédérations sportives se structurent. À Cotonou, Porto‑Novo et Parakou, les premiers clubs de football (Requins d’Atlantique, Dragons de l’Ouémé, Buffles du Borgou) rassemblaient des foules enthousiastes. Dans les cours d’école, l’athlétisme et la boxe émergent grâce à des enseignants passionnés.
Des pré-jeux de la communauté à Tananarive (1960) aux jeux de l’Amitié à Dakar (1964) passant par les jeux de l’Amitié à Abidjan (1962), les premières délégations représentent le Bénin aux championnats régionaux. Malgré le manque d’infrastructures modernes et de soutien financier solide, ces premiers ont bâti les fondations d’une culture sportive résiliente. Le sport devient alors le terrain symbolique où les différences ethniques ou sociales s’oublient derrière un rassemblement enthousiaste.
1980‑2000 : période des passions locales et des limites structurelles

Les années 80 et 90 confirment l’ancrage populaire du sport. Les rencontrent de football donnaient plus d’engouement. Les derbys Dragons vs Requins embrasent le stade de l’Amitié. Déjà quintuple champions du Bénin (1978, 1979, 1982, 1983, 1986), les Dragons de l’Ouémé atteignent en 1987 les demi‑finales de la Ligue africaine des champions CAF : un exploit encore inégalé par un club béninois. À la boxe, le boxeur Aristide Sagbo dit « Sowéto » décroche la ceinture africaine des poids plume en 1991 et défend son titre trois fois avant de la céder. Fernand Gandaho sacré meilleur cycliste de l’Afrique de l’ouest après avoir remporté le Tour Cycliste du Bénin, du Togo et de Guinée est l’une des gloires du cyclisme béninois.
Ces coups d’éclat masquent toutefois une réalité plus dure : la dégradation des infrastructures sportives, le manque de centres de formation et les crises internes des dirigeants sportifs. En manque de moyens, les fédérations n’ont le choix que de se remettent aux bonnes volontés individuelles. Mais malgré cela, la passion ne faiblit pas ; on joue, on court, on boxe, par amour du sport et pour la fierté d’appartenir à une communauté qui vibre au même rythme.
2000‑2019 : les premiers pas sur la scène continentale
Le nouveau millénaire apporte un vent d’espoir. En 2004, les Écureuils se qualifient pour leur toute première Coupe d’Afrique des Nations (CAN) en Tunisie. Trois défaites en trois matchs de groupe n’effacent pas la joie du public sportif béninois, car l’essentiel est d’avoir franchi la porte. En 2005, le Bénin organise la CAN U20 : porté par un stade plein, le Bénin termine troisième et s’offre un ticket pour le Mondial junior où après deux matchs nuls et une défaite, ils quittent la compétition. Les participations suivantes à la CAN en 2008 et 2010 n’ont pas été convaincantes mais montrent une équipe perfectible. Puis vient cette fameuse édition 2019 en Égypte. Invaincus en phase de groupes, les Écureuils éliminent le Maroc de Hervé Renard en huitièmes de finale et échouent de justesse face au Sénégal (1-0) en quarts.

Ce parcours galvanise tout un peuple et fait des joueurs comme Stéphane Sessègnon, Mickaël Poté ou Saturnin Allagbé des figures nationales. Mais dans l’ombre du football, d’autres disciplines progressent. Le karatéka Damien Dovy devient champion du monde en 2002 sous le drapeau béninois. L’athlétisme voit éclore Noélie Yarigo et Odile Ahouanwanou, symboles d’un sport féminin conquérant. Au handball, les juniors accrochent le podium du Challenge Trophy 2011. Même la pétanque s’offre une première place mondiale grâce à Gérard Agossa en 2007.
2020‑2025 : renaissance, professionnalisation et ambitions nouvelles
Les réformes gouvernementales récentes marquent un tournant. De nouvelles infrastructures sportives sont construites et celles existantes sont rénovées. De nouvelles ligues professionnelles voient le jour. De nouvelles fédérations s’hissent. Le sport béninois devient de plus en plus professionnel, des soutiens financiers sont accordés aux fédérations et aux meilleurs athlètes. La gestion des ressources des fédérations et des associations sportives sont désormais contrôlées. Le gouvernement accompagne les fédérations dans leurs déplacements pour les compétitions internationales. Le développement du sport jeune est devenu une priorité au Bénin, la relève frappe ainsi à la porte.
Les grands noms du sport béninois : des moteurs d’inspiration

Chaque génération a ses héros. Si Richard Amoussou dit « Atanpinso », (premier capitaine de l’Asso Porto‑Novo), Saadou do Régo, Adolphe Ogougnon, Expédit Dossou Glèlè, Edmé Codjo (football) ; Sonia AGBESSI, Jérôme Carlos, Reine Coovi (athlétisme) ; les jumeaux Gnonlonfoun, Hounsa Symphorien, Minavoa Julien, Johnson Michel (en handball) ; Sowéto, Expédit Montcho (Boxe) ou même Gandaho Fernand (cyclisme) ont marqué les années 1900, le nouveau millénaire a vu défiler Damien Dovy au karaté, Mouri Ogunbiyi au football. La génération actuelle quant à elle n’aura qu’à louer les exploits de Stéphane Sessègnon, Noélie Yarigo, Odile Ahounwanou, Isabelle Yacoubou, Ian Mahinmi et autres… Chacun d’eux a tracé un chemin où la persévérance compte plus que la médaille, où la fierté de porter le vert, jaune, rouge transcende les manques matériels. Par leur exemple, les jeunes athlètes d’aujourd’hui prouvent qu’un passeport béninois n’est jamais un frein à l’excellence.
Défis persistants et voies d’avenir
Malgré les progrès, le paysage sportif béninois reste fragile : infrastructures à construire, staff technique parfois sous‑formé, gouvernance des fédérations à perfectionner. La lutte contre la corruption sportive, la mise en place de ligues féminines solides et le financement durable des clubs amateurs sont autant de chantiers urgents. Le sport se révèle aussi vecteur d’inclusion : il rassemble jeunes et moins jeunes, filles et garçons, citadins et ruraux autour d’un même rêve : voir, un jour, le drapeau béninois flotter sur un podium olympique.

En 65 ans, le sport béninois a traversé l’amateurisme héroïque, les désillusions continentales et les renaissances successives. Il a été tantôt négligé, tantôt célébré, mais jamais éteint. Car derrière chaque passe maladroite, chaque chrono amélioré ou chaque crochet victorieux, brille la même flamme : la volonté de se dépasser.


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